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LABAT Emmanuel

Année de sortie : 1871


Né à Gimbrède le 27 octobre 1853, Emmanuel Labat est l’un des médecins locaux qui a eu le plus d’influence au début du XXe siècle. S’il est Gersois de naissance, il est, pour beaucoup de Lot-et-Garonnais, l’un des leurs.

Fils du maire de Gimbrède sous le Second Empire, le jeune Emmanuel grandit au village où il fréquente l’école communale dès la fin des années 1850. À cette époque, presque tous les élèves sortis de l’école sont cultivateurs ; quelques-uns exercent un métier manuel et se fixent dans la commune. Emmanuel Labat a un autre destin. En 1866, il intègre le pensionnat du lycée d’Agen en classe de quatrième : chaque année, il se distingue par des prix d’excellence et des prix d’honneur, en latin comme en grec. Son nom est naturellement inscrit au parloir du lycée dans la liste des prix d’honneur de rhétorique et de philosophie qui s’y trouve affichée. En 1870, il obtient le prix d’honneur de discours latin et un accessit de dissertation de français au concours général des lycées.

Il gagne ensuite la Faculté de médecine de Toulouse où il s’illustre, comme interne de garde, pour sa conduite à l’Hôtel-Dieu le jour de l’inondation de 1875 (le 23 juin), ce qui lui vaut une médaille d’honneur de 1re classe. Il poursuit ses études à Paris. Il y devient externe puis interne à son premier concours (3e de la promotion de 1876), promis à l’agrégation. Il publie sa thèse sous le titre Recherches cliniques expérimentales sur la tête du fœtus au point de vue obstétrical en 1881, qui marque son orientation et sa spécialisation.

Cependant la mort prématurée de son père le ramène à Gimbrède, auprès de sa mère : à 28 ans, il commence à exercer comme médecin de campagne, tout en donnant, trois jours par semaine, des cours de gynécologie à l’École de médecine de Toulouse, de 1883 à 1890. Il renonce donc à Paris, où l’avenir lui était grand ouvert, pour retrouver son pays gascon et veiller sur sa mère qui décède en 1890.

Deux ans plus tôt, en 1888, il avait épousé la fille du maire de Laplume, Élisabeth Camicas, à peine âgée de vingt ans, et s’était installé chez sa belle-mère, veuve, dans la belle demeure d’Escuran à la sortie de Laplume, sur la route du Saumont.

En août 1907, sur proposition du ministre de l’Intérieur, Georges Clemenceau, il est fait chevalier de la Légion d’honneur, insignes que lui remet son compatriote Odilon Lannelongue à Condom quelques semaines plus tard.

En 1909, il présente une communication au Congrès d’hygiène qui se tient à Agen : il l’envoie à la Revue des Deux Mondes qui la refuse. Labat ne s’arrête pas à ce premier échec et la Revue acceptera très vite bien d’autres articles, et ce jusqu’à sa mort (dont « Le médecin, sa conversation et son esprit clinique », en avril 1923). Cette même année 1909, il publie Un village en Gascogne du point de vue de l’hygiène sociale : la commune de Laplume.

C’est Philippe Lauzun (ancien élève sorti en 1864) et Léopold Bordes (éminent Normalien, agrégé de grammaire, professeur de Lettres du lycée Palissy durant près de 40 ans) qui se chargent, pour la Revue de l’Agenais, de dresser les comptes rendus des articles qu’il publie entre 1911 et 1914 dans La Revue des Deux Mondes sur la natalité (ou plutôt l’hypo-natalité) en Gascogne, l’abandon de la terre, la culture morale à l’école du village et la vocation paysanne.

Ces articles d’avant-guerre constituent en fait les chapitres de son ouvrage sur L’Âme paysanne dans lequel Labat, à 66 ans, donne sa pensée tout entière : publié en 1919, il fait l’objet de plusieurs rééditions, la première dès 1925 ; la seconde, et ce n’est pas anodin, en 1942. Labat y développe des idées forces sur l’importance de la paysannerie pour la prospérité du pays, la valeur de la vocation paysanne, la nécessité d’adapter l’éducation en conséquence, l’éminente influence des facteurs psychologiques et moraux. Négligeant sans doute trop les conditions économiques qui paupérisent le Gers, il explique sa dépopulation au XIXe siècle par la perte de la vocation de paysan, perte qu’il qualifie de « dégénérescence ».

Au cours de la Grande Guerre, il est pendant cinq ans médecin de l’hôpital des Femmes de France à Agen, mais il tombe malade en 1920 et s’éteint à 72 ans, le 6 mai 1925 à Paris, rue de Breteuil, avant d’être rapatrié à Laplume, où il est enterré.

Attentif à ses malades et à leur condition sociale, Emmanuel Labat peut être considéré comme un précurseur de la médecine psychosomatique et même de la médecine bio-psycho-sociale sur l’exemple du médecin américain Richard Cabot.

En décembre 1941, la commission lot-et-garonnaise de propagande régionaliste émet le vœu qu’un monument soit élevé à Agen, à la mémoire du docteur Labat, chargeant la Société académique de sa réalisation qui ne verra jamais le jour. Une rue d’Agen porte cependant son nom.

Notice réalisée par Pascal Geneste, secrétaire général adjoint